Presse Internationale -- Niger
18 novembre 1996
N° 224 (en page IV de couverture)
Musique
Nelly Pouget :
" le dire et le vivre en saxo "
Après vingt ans d'absence de Niamey, la saxophoniste française Nelly Pouget est de retour. Bien que ce ne soit pas dans le cadre d'une tournée musicale, elle n'a pas pu résister à l'insistante invitation au voyage d'une amie nigérienne qui l'a ramenée de Paris.
En marge de ces retrouvailles, Nelly prend des contacts avec les milieux amateurs
et professionnels de la musique nigérienne.
La saxophoniste de jazz de création a consacré une journée
a la découverte du Centre de Formation et de Promotion Musicale (CFPM),
où elle a apprécié la qualité du travail que l'on
y déploie. Nelly Rouget a eu une attention particulière pour le
matériel du CFPM, surtout les instruments de musique traditionnels et
modernes. Elle est convaincue que ce sont des atouts inestimables avec lesquels
on doit pouvoir promouvoir efficacement la création musicale au Niger.
A la faveur de la campagne électorale, Nelly a rencontré des choeurs de filles avec lesquels elle a joué. Mais c'est du Niger profond qu'elle garde une forte impression. "J'ai eu, déclare-t-elle, des échanges spontanés avec des guitaristes traditionnels et bien d'autres virtuoses de la brousse avec lesquels j'ai joué en duo. C'était très intéressant. J'écoute d'abord la mélodie, ensuite j'essaie de la maîtriser et nous entamons ensemble une ballade musicale qui s'achève sur des éclats de rires. C'est très enrichissant pour moi."
Pourtant, Nelly a suivi une formation classique. Elle fréquente le conservatoire de musique de Dijon, puis les Beaux-Arts dans la même ville. De 18 a 20 ans, elle va parcourir l'Afrique. Elle traverse le Sahara, fait escale a Niamey, Quaga, Bobo, Cotonou, Lomé. C'est l'époque de la pop-music, bigin et reggae.
Depuis
une quinzaine d'années, Nelly vogue dans le Jazz, un jazz dit de création
où l'interprétation laisse place à l'improvisation et a
l'innovation technique. Elle aurait souhaité voir davantage de musiciens
africains aborder ce genre, qui, selon elle, a besoin d'authenticité
africaine. Pour illustrer son propos, elle rappelle l'expérience du guitariste
sénégalais Cheikh Tidjane Fall qu'elle a côtoyé.
"Cheikh Tidjane Fall, dit-elle, est très branché sur
le Jazz, mais il a conservé le fond traditionnel africain
de sa musique".
La musique de Nelly Rouget, qui vit actuellement a Paris, reste très
enracinée dans l'actualité, "Quand on a quelque chose à
dire, il faut le dire". Elle poursuit l'explication de son engagement
"lorsque l'on fait de la musique de création, ce n'est pas facile
d'être femme, saxophoniste et chef d'orchestre. Il faut le vivre".
"Le Dire" et "Le Vivre" sont deux compacts disques qu'elle a enregistrés au studio Adam (production Minuit Regards) en 1991 et 1993. Plus récemment, en juin 1996, elle a fait produire une cassette vidéo avec le "Nelly Pouget Quartet". Un quartet très international, avec au piano, l'israélien Noah Rosen ; un batteur japonais, Makoto Sato ; un contrebassiste africain-américain, James Lewis, et Nelly Pouget au saxo.
Saxophoniste engagée contre les essais nucléaires et toutes sortes de racisme, Nelly a pris part avec d'autres musiciens parisiens à la nuit de soutien aux sans-papiers de l'Eglise Saint-Bernard. Elle sera le 15 décembre prochain au Festival pour la Paix qu'organise la cellule française du Mouvement International pour la Paix. Avant ce festival, elle se produira dans le XIVe Arrondissement, cabaret le Magique
J.B. DOSSOU-YOVO